Brett Gosper : « La World Rugby c’est plus de 7 millions de pratiquants dont 20% de femmes »

A quelques jours de la Coupe du Monde de Rugby nous avons rencontré Brett Gosper, directeur général de World Rugby, la fédération internationale pour parler du développement du Rugby à l’international.

Brett Gosper : « La World Rugby a déjà atteint son objectif de 7 millions de joueurs, ce qui représente une augmentation par deux du nombre de pratiquants depuis 2009 »

A la lecture du plan stratégique « 2010-2020 »mis en place par World Rugby (ex-International Rugby Board, l’instance qui dirige, contrôle, organise le rugby mondial) on s’aperçoit que certains objectifs sont d’ores et déjà atteints.

En effet. C’est pour cela que l’on est en train de le réviser d’ailleurs. Le plan a 5 ans, on est à la moitié du parcours et on pense qu’il faut que l’on revoie les objectifs. La stratégie restera la même je pense d’après nos premières réunions mais ce sont les « Key Performers Indicators », les indices de performances qui vont changer. Par exemple, la mission de faire croitre notre sport reste mais nous avons déjà atteint en 2015 notre objectif de 7 millions de joueurs, ce qui représente tout de même une augmentation par deux du nombre de pratiquants depuis 2009. L’indicateur de performance étant atteint en 5 ans, nous nous devons de revoir ceux-ci.

Comment se fait-il que vous ayez atteint en si peu de temps vos objectifs ?

Peut-être qu’ils avaient fixé la barre trop bas, je ne sais pas mais je pense aussi qu’il y a eu une croissance étonnante qui n’était pas prévue à l’époque. Pour revenir au nombre de pratiquants, là cette année, on va passer à 8 millions ; j’ai le sentiment que la Coupe du Monde, cette merveilleuse vitrine en est pour quelque chose. D’autant que l’argent généré par la Coupe du Monde est investit dans le sport à tous les niveaux, une somme importante. De même la notoriété offerte par notre présence aux jeux Olympiques de Rio en 2016 est vectrice de croissance tout comme l’argent donné par les Comité Nationaux Olympiques et les gouvernements ; là aussi l’argent est réinvestit dans notre sport et comme nous sommes désormais considéré comme un sport olympique le département de l’Education pour le Développement par le Sport prend en compte le rugby ; notre sport est donc pratiqué dans des territoires où il n’avait jamais été joué auparavant.

La Chine par exemple ?

Oui tout à fait. Grâce à notre label Olympique nous avons pu pénétrer dans les écoles militaires en Chine, les écoles russes ou d’autres territoires en Asie et Europe de l’Est ; les universités américaines par exemple proposent désormais des bourses pour la pratique du rugby.

Brett Gosper : « Le World Rugby c’est le mouvement des spectateurs, des clubs, des fédérations »

Le changement de nom de l’IRB en World Rugby prend désormais tout son sens.

Oui complètement. Ce changement de nom qui s’est fait pour plusieurs raisons vient déjà de la reconnaissance de là où l’on vient. Et cela nous équipe, si je puis dire, pour l’avenir afin de chercher de nouveaux marchés notamment pour tous les aspects sportifs et leurs supports de communication. Le nom World Rugby même si je sais qu’il est difficilement prononçable par les français (rires) dit aux membres ce que l’on fait, d’où l’on vient. Ce n’est pas un groupe de gens qui décident sur le jeu c’est tout un mouvement qui a pour terrain de jeu le monde entier.

L’IRB pouvait effectivement avoir cette image de juges débonnaires discourant sur le jeu

L’IRB c’est des gens en cravate qui décident pour le reste du rugby. World Rugby c’est le mouvement des spectateurs, des clubs, des fédérations mais aussi une espèce d’unité que l’on va pouvoir décliner sur toutes nos compétitions. Vous verrez même d’ici 2019, le symbole de World Rugby au sein d’un logo…

Les déclinaisons Rugby Asia ou Rugby Europe suivent-elles le même chemin ?

Oui quelque part. Car ils ont du s’apercevoir que c’était très difficile de faire du marketing pour ARFU (Asian Rugby Football Union, ancienne dénomination de Asia Rugby). De même pour la Fira-Aer (Fédération Internationale du Rugby Amateur – Association Européenne du Rugby ancienne dénomination pour Rugby Europe), c’est difficile pour les gens de l’extérieur de comprendre ce qu’on y fait, non ? Rugby Europe, on comprend ! C’est le même mouvement un peu partout, prenez par exemple le rugby anglais, pour la communication c’est England Rugby mais la société c’est toujours RFU (Rugby Football Union), ou encore Cricket Australia avant c’était le Board du cricket de l’Australie, bon… Donc avec ces nouveaux noms on voit désormais le lien entre l’entité, le mouvement et le marketing du produit.

Est-ce que le scandale que vit la Fifa vous a obligé à mettre en place de nouveaux « garde-fous » ?

Je pense que tous sports en voyant ce qui s’est passé à la Fifa doit se regarder avec beaucoup plus de vigilance et de prudence au niveau de leur gouvernance et des autres domaines. Le rugby est bien placé, on dit que l’on doit réparer le toit lorsqu’il ne pleut pas mais nous on n’a rien à réparer. Je pense qu’il ne faut être trop confiant mais rester vigilant. Cela a donné un petit avertissement à tous les sports dans le cas où vous n’êtes pas bien organisé.

C’est un gros avertissement tout de même

Oui, oui tout à fait surtout pour la Fifa. C’est un avertissement pour le sport en général.

Pour revenir au plan stratégique il apparait justement que certaines mesures de vigilance existent déjà puisque les nombreuses commissions semblent se contrôler les unes envers les autres.

Oui c’est ça. On a comme on dit en anglais les checks and balances, les équilibrages et les vérifications et les processus de contrôle que ce soit les finances, les risks committies, l’audit committee, le conseil qui est l’autorité suprême. Il y a en fait beaucoup de groupes qui veillent les uns sur les autres.

Ce n’est donc pas Bernard Lapasset qui contrôle tout ?

(rires) non cela ne va pas à lui, ni à moi. Il y a beaucoup de monde dans nos processus. Cela veut dire aussi que l’on est parfois pas les plus rapides dans les process de décision mais nous sommes justes et surtout transparents.

Bratt Gosper : « Dans le monde, les femmes représente 20 % des 7 millions de pratiquants, aux Etats-Unis c’est 25 % ! Les femmes sont un axe de développement »

Pour finir, puisque vous êtres en train de revoir le plan stratégique au sein de World Rugby comment voyez-vous le rugby pour disons les 10 prochaines années ?

Je pense qu’il y a une croissance naturelle sur laquelle on doit veiller mais surtout on voit l’arrivée de nouveaux pays qui n’étaient pas traditionnellement tourné vers le rugby. Nous on se doit de donner un coup de pouce, une espèce de retour commercial envers ces pays comme par exemple les Etats-Unis, le Brésil et même l’Allemagne. Si on gère bien l’opportunité on va avoir, je pense, assez vite un retour financier sur une Coupe du Monde ou sur d’autres secteurs du jeu. Je pense que c’est la croissance de ces nouveaux pays et des pays établis, je parle de ceux qui sont dans les rankings de 20 à 30 -qui sont viables commercialement- qui pourront aller, à terme, dans les premiers rangs. C’est le succès sur le terrain qui engendre le succès en dehors du terrain. Donc l’Allemagne qui était au 24ème rang récemment, très intéressant commercialement et les Etats-Unis…le rugby y est le sport collectif qui y connait le plus de croissance. Notamment chez les femmes. Dans le monde, les femmes représente 20 % des 7 millions de pratiquants, aux Etats-Unis c’est 25 % !Les femmes sont un axe de développement notamment dans ces nouveaux pays. Un autre c’est l’équilibre du rugby à 7 et à XV en se disant que le 7 pourrait être une voie pour aller vers le XV sans oublier tous les autres rugbys : le beach, le toucher qui vont se trouver sous l’appellation World Rugby.

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Et toujours pas le XIII ?

Le XIII c’est une autre fédé qui fait ses trucs de son côté.

Parce que pour le grand public c’est toujours un mystère cette distinction XV et XIII

C’est le mystère mais c’est l’histoire, c’est ainsi. Le XIII est totalement viable commercialement en Australie, dans le nord de l’Angleterre mais à part ces deux pays…

L’Asie ?

C’est un très beau territoire. C’est pour cela que l’on y va, nous le rugby à XV, dès 2019 avec la Coupe du Monde au Japon mais d’ici 2019, des grands axes de développement seront déployés sur ce continent en espérant que cela fonctionne.

Et l’Afrique ?

Oui. On voit l’émergence du Kenya, du Zimbabwe, la Namibie est toujours là en Coupe du Monde et l’Afrique du Sud reste toujours très fort et pousse parfaitement ses voisins. Le Maroc aussi. Le rugby se joue partout en Afrique, cela se développe et c’est notre plus grand souhait pour le rugby mondial et pour World Rugby.

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