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Interview de Pedro Garcia-Ayesta, Rédacteur en chef – Head of Tennis Eurosport International

Eurosport France nous a présenté son dispositif pour Roland-Garros le 30 avril dernier. Pour boucler la boucle avec la maison Eurosport et afin de vous transmettre les informations complètes sur la couverture de Roland-Garros 2015 par Eurosport, nous avons décidé de vous proposer l’interview du responsable section tennis à l’international d’Eurosport, qui a rejoint le groupe en 1998. A quelques jours des qualifications et du début du tournoi Porte d’Auteuil (19 mai – 7 juin), Pedro Garcia-Ayesta vous livre ses pronostics, quelques petites anecdotes sur les joueurs qu’il reçoit pour les plateaux de ses émissions avec Mats Wilander, ancien numéro 1 mondial et 7 fois vainqueur de grands chelems et Barbara Schett, présentatrice et ancienne numéro 7 mondiale.

Bonjour Pedro Garcia-Ayesta, pouvez-vous vous présenter?

Je suis rédacteur en chef adjoint à Eurosport International mais je suis surtout en charge de tennis, « head of tennis ».

Combien de Roland-Garros avez-vous à votre actif ?

Mon premier Roland-Garros, c’était en 2007-2008.

Comment se passe la préparation de cet événement ? Tu planifies les choses combien de temps à l’avance ?

Ça peut donner l’impression d’une exagération mais, par exemple, lorsque l’on a fait Roland-Garros 2014, il y a une partie de nous qui pense déjà à RG 2015. Il y a des choses qui se passent au quotidien dont tu te dis que l’année prochaine, « ça devrait changer », « on devrait faire ça ». Ce sont des choses dont il faut se rappeler pour les modifier l’année d’après. Donc, en 2014, on pensait déjà à 2015. Après, les premiers échanges avec la fédération française de tennis ont été en janvier 2015 pour commencer à avancer sur des choses plus concrètes. C’est à partir de ce moment-là qu’on commence à se plonger dedans, à écrire des choses, à formuler tous les besoins et à commencer à récupérer toutes les informations sur les choses que l’on devra faire, les éléments sur lesquels on devra être prêt le jour J. C’est un travail de 6 mois. On fait d’autres choses aussi mais on a ce fil rouge pour préparer Roland-Garros.

Est-ce que les consultants sont renouvelés ? Y-a-t’ il du changement ?

Pour cette année, depuis l’Australian Open, c’est Barbara Schett qui est la présentatrice de notre émission à la place d’Annabel Croft, (ancienne joueuse de tennis britannique). Avant Barbara était la reporter « de luxe ». Aujourd’hui, elle est la présentatrice de nos émissions. Cela signifie que ce Roland-Garros 2015 sera son tout premier dans ce rôle-là.
Notre grand ambassadeur de tennis depuis 10 ans s’appelle Mats Wilander. Lui, il va continuer à avoir son rôle d’ambassadeur « de luxe » de tennis à l’international. Cette année, il va être renforcé par Chris Evert (7 fois vainqueur de RG). Ça, c’est confirmer. Et puis, nous sommes toujours à quelques semaines de Roland-Garros, il pourrait y avoir d’autres renforts de très haut niveau. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, l’équipe est formée avec les personnes citées à l’instant mais il pourrait y avoir quelques nouveautés à venir également.

En ce qui concerne la structure Eurosport International ?

En ce qui concerne cette structure internationale, qui est composée par différentes versions va permettre aussi de bénéficier aussi des autres experts des autres versions. Cette année, nous allons avoir pour la première fois, un ancien champion de Roland-Garros de nationalité italienne, Adriano Panatta, qui va renforcer l’équipe et également participer aux émissions de Mats Wilander. On va voir aussi Alex Corretja, qui rejoint l’équipe pour la version espagnole et va également participer aux émissions de Mats Wilander. Nous avons Patrick Mouratoglou, qui va avoir une petite émission au niveau de l’international pour la première fois. Avant il n’était qu’un consultant pour la version française qui participait occasionnellement pour l’international. Cette année, il va réellement avoir son petit programme, qui s’appelle « The Coach » sur l’international. On bénéficie de tous les experts de toutes nos chaînes, que ce soit Henri Leconte, Marion Bartoli ou Thomas Enqvist.

 

Pedro Garcia-Ayesta : « On diffuse le tirage au sort de Roland-Garros en direct pour toute l’Europe pour la première fois, le vendredi 22 mai 2015 à 11h30. »

Les émissions seront toujours Game, Set & Mats ? Matspoint ? Il y aura d’autres émissions ?

– Vendredi 22 mai 2015, on commence, cette année, pour la première fois le vendredi, à 11h30. On produit et diffuse, pour la première fois, le tirage au sort de Roland-Garros en direct pour toute l’Europe. C’est une nouveauté parce qu’il n’y a pas une chaîne qui l’a fait jusque-là. Et Eurosport va le faire. Nous allons être responsables de la production avec la fédération française de tennis mais après, nous allons être le diffuseur pour toute l’Europe, la France inclus bien entendu, de ce tirage au sort.
– Samedi 23 mai 2015, notre dernière émission pré-Roland-Garros s’appelle « Get Ready for Roland-Garros ». Cette émission sera un direct depuis Roland-Garros, Porte d’Auteuil. Après cette émission, il y aura la deuxième émission de « Tennis for Evert » avec la championne américaine, mais ce sera la première effectuée à Roland-Garros. C’est à partir de ce jour-là que l’on va commencer à avoir toutes ces émissions.

Cette émission sera quotidienne ?

Non, il y aura six épisodes de « Tennis for Evert ». Il va y avoir une première émission de présentation de Chris Evert qui a été tourné à Miami dans son académie et qui sera diffusé le 18 mai. Et après, à partir du début de Roland-Garros, ce sera six épisodes exclusivement : début du tournoi, week-end intermédiaire et pour la finale. En plus, Chris Evert est censée participer également aux émissions de Mats Wilander.

Comment se passent vos journées à Roland-Garros ?

Pour la partie publique, on a une émission à 10h du matin pour Eurosport France. Même si mon équipe de production et moi-même ne sommes pas impliqués, nous sommes présents dès le début parce que l’on accompagne cette émission. Tous les moyens techniques et humains qui sont mis en place, il y a un travail, il y a une coordination. Je suis en étroite collaboration avec la responsable de production tennis, qui s’appelle Isabelle Fontanel. On essaye d’être présent sur tous les fronts dès le début de la journée, soit dès que commence l’émission d’Eurosport France jusqu’à la fin de journée, qui se termine avec l’émission d’Eurosport Espagne. Entre les deux, on reste très facilement 13-14 heures sur place.

Il y a des choses que l’on planifie de la veille, en fonction des programmes de la journée, des besoins de chacun, de chaque chaîne ou de chaque programme. On commence par un petit point journée écrit pour établir le travail de chacun. Avec cela, il y a tout le travail des demandes de coordination, des besoins d’interviews, pour l’accès aux joueurs, aux coachs, aux personnalités avec la fédération française et la fédération internationale de tennis, l’ATP et la WTA. C’est notre travail. Et après cela, la troisième étape, on commence à avoir des mini briefs avec les différentes équipes. A partir de là, une fois que tout ça est fait, il s’agit plus de coordination humaine. Faire venir les joueurs, coordination avec la communication, vérifier les conducteurs, faire les directs.

La partie non publique, c’est quand le matin, je me réveille à 4h du matin et que je commence déjà à réfléchir sur les choses et que je ne dors plus. Et la journée se termine à 1h du matin.

Maintenant, vous connaissez assez bien les joueurs, vous auriez des petites anecdotes, par exemple, lors de vos émissions ?

Dans notre dispositif Roland-Garros, notre grand plaisir, c’est lorsque l’on accueille les joueurs sur nos plateaux et qu’ils viennent chez nous. C’est clair que quand tu vois Rafael Nadal, Novak Djokovic, Serena Williams ou Roger Federer, tu te dis « wow ». Ce sont de grands moments de satisfaction. Après, chacun a sa petite histoire, son petit côté marrant. Il y a des joueurs et des joueuses qui viennent très simplement parce qu’ils ont gagné un match. Ils viennent une fois, deux fois etc. Ce sont des joueurs de très très haut niveau.

Ils ne sont jamais stressés par les caméras… Il n’y en a pas un qui est timide ?

Non, ils ne sont pas stressés. Tous agissent ainsi. Le seul souci qui puisse y avoir, c’est la barrièrre de la langue. Mais ça c’est exceptionnel parce qu’ils savent que lorsqu’ils viennent sur les plateaux d’Eurosport, ils vont parler avec Barbara Schett ou Mats Wilander. Et là, ils savent très bien à qui ils s’attendent. Ils savent que ça va être décontracté parce que c’est de cette manière que nous faisons nos émissions. L’année dernière, nous avons eu Novak Djokovic qui est venu sur le nouveau plateau et qui nous a dit « wow, I love the design ». Il s’est allongé sur la table etc. Mais après, voilà, la relation est tout de même professionnelle. C’est pas pareil pour Mats car il connait beaucoup plus les joueurs.

 

Rafael Nadal : « Moi ou Djokovic !?! Moi, j’ai gagné neuf fois. Lui, il a gagné zéro fois. Qui doit avoir la pression ?! »

 

A propos de Rafael Nadal… On ne va pas dire qu’il va rentrer sur le tournoi en mauvaise place mais que c’est plutôt compliqué pour lui. Que pensez-vous de ses chances concernant une dixième conquête de Roland-Garros ?

Oui, il peut gagner. Bien-sûr, il peut gagner. Aujourd’hui à moins de deux semaines du tournoi, sa tâche pour gagner Roland-Garros a l’air plus difficile. C’est en partie parce qu’on a l’habitude de le voir arriver en ayant tout gagné. Mais ce n’est pas simple pour lui parce que pendant pas mal d’années, il a eu des problèmes en début de tournoi. Rafael Nadal le dit lui-même ; il n’est pas comme avant. Il travaille. C’est un grand bosseur. Mais il sait gagner. Il a quand même gagné neuf fois. Il y a un peu plus d’une semaine, j’étais à Madrid avec lui et je lui ai demandé quelle était la pression qu’il allait avoir à Roland-Garros, si c’était lui ou Djokovic qui l’aurait le plus. Et Nadal m’a dit : « Moi ou Djokovic !?! Moi, j’ai gagné neuf fois. Lui, il a gagné zéro fois. Qui doit avoir la pression ?! »

Et s’il le rencontre avant la finale ?

Oui, et bien peut-être qu’il va le rencontrer en quart de finale. Si Rafa descend du 4ème rang de l’ATP, ils peuvent se rencontrer en quart de finale. Mais en finalité, qu’il joue Djokovic en finale ou en quart de finale, il va le jouer. Ou peut-être, il ne le jouera pas parce que Djokovic est tombé sur une autre partie de tableau et qu’il s’est fait taper par David Ferrer. Et Rafa arrive en finale sans jouer Djokovic. Rafa n’est pas à son meilleur. Il doit améliorer des choses. Mais il a gagné déjà. Il sait ce que c’est que de gagner et on joue en cinq sets sur terre battue. Ça, c’est un avantage pour lui. Il peut perdre en trois sets à Monte Carlo, à Barcelone mais peut-être que ce match en cinq sets à Barcelone, il l’aurait gagné parce que lui quand il joue en cinq sets à RG, c’est simplement hallucinant. Il n’a perdu qu’un match en neuf éditions.

Donc, vos pronostics chez les hommes ?

Je pense que les deux seules personnes qui peuvent gagner à Roland-Garros, ce sont Nadal et Djokovic.

Et Kei Nishikori, en tant qu’outsider?

Il est très fort mais il ne pourra pas gagner. Il vient de gagner Barcelone. Il est de plus en plus mature. Physiquement, il fonctionne très bien. Il a un tennis de bagarreur. Ce n’est pas un mec spectaculaire. Mais il est là. Il travaille chaque point. Il a le talent. Il a bien grandi dans la culture américaine Bollettieri. Mais honnêtement, je ne le vois pas gagner Roland-Garros aujourd’hui parce qu’il y a surtout Nadal et Djokovic. Par contre, il est clair que s’il n’est pas en quart de finale, ce sera une surprise pour moi.

Et chez les femmes ?

Je pense que Serena (Williams) est intouchable. L’histoire de l’année dernière où elle s’est faite sortir au 2ème tour par l’Espagnole Garbiñe Muguruza, c’est le mérite de Muguruza mais c’est aussi un accident. Pour moi, c’est Serena. Mais après, il faut reconnaître qu’il y a des Simona Halep, qui a montré qu’elle est très très forte quand elle peut, qu’il y a des Sharapova. C’est plus ou moins les trois que je vois.